Pour commencer ce blog, je voudrais vous résumer, mais pas trop, un livre d'un journaliste scientifique américain, Gary Taubes. Gary, qui est physicien de formation, a un jour décidé de se plonger dans l'approche scientifique de la nutrition. Appliqué et méticuleux comme un journaliste scientifique de rêve, Gary a peu à peu découvert que certains des principaux dogmes de la nutrition n'avaient pas de fondements. Le cholestérol ne bouche pas les artères, le gras ne fait pas grossir, le sel ne cause pas l'hypertension, les régimes basse-calorie ne marchent pas, les régimes pauvres en glucides ne sont pas dangereux et sont efficaces... ce sont quelques-uns des principaux résultats établis, ou du moins suggérés, par le livre de Gary: Good Calories, Bad Calories.
Sans plus attendre, voici donc mon résumé en français du prologue du livre (je vous mets le premier chapitre demain):
Une brève histoire de Banting
Les régimes pauvres en glucides ont été la norme depuis l'invention du régime au 19ème siècles jusque dans les années 1970. Ils ont démontré leur efficacité, et il y a de bonnes raisons de croire que presque toutes nos croyances alimentaires sont fausses.
Petit obèse anglais en 1862, Banting publiait en 1863 sa Letter on Corpulence, Addresed to the Public (Lettre au grand public sur la corpulence). Son médecin lui avait prescrit un régime faible en glucides, avec de la viande, du poisson ou du gibier à tous les repas, et il avait perdu 23 kg (sur 90 initialement) et retrouvé une excellente santé. La Lettre de Banting a initié la première mode de régime de l'histoire. Publiée et traduite aux Etats-Unis, en Allemagne, en Autriche, en Allemagne et en France, on dit qu'elle fut suivie par Napoléon III entre autres personnalités. Otto von Bismarck avait perdu 27kg (sur 110) avec un régime similaire. « Banting » est même devenu un verbe anglais signifiant « faire un régime ».
Par-delà le médecin de Banting, les origines de ce régime pauvre en glucides sont à trouver en France, dans les travaux de Claude Bernard, de Brillat-Savarin (Physiologie du goût, 1825), et de Jean-François Dancel (Traité théorique et pratique de l'obésité (trop grand enbonpoint), 1864). En 1951, une équipe menée par Raymond Greene publiait un manuel d'endocrinologie recommandant un régime anti-obésité similaire, et similaire donc aussi à celui que des « iconoclastes » comme Atkins ou Taller allaient proposer vingt ans plus tard aux Etats-Unis. Le fameux Dr. Spock n'écrivait pas autre chose aux futurs parents sur la question du poids, et c'est aussi ce que ma grand-mère de Brooklyn me disait il y a quarante ans : ce sont les pâtes, le pain et les desserts qui font grossir.
Mais dans les années 1980, les glucides étaient bons pour le coeur et pour la santé. On n'incriminait plus le pain, mais le beurre ; plus les pâtes, mais les viandes rouges. Ce fut l'un des renversements les plus spectaculaires de l'histoire de la santé publique. Alors que tous les cliniciens connaissaient et reconnaissaient l'efficacité des régimes pauvres en glucides, l'establishment médical les dénonçait comme des engouements passagers et dangereux. Les rapports contemporains sur l'efficacité de ces régimes, peu nombreux, étaient activement ignorés, de même qu'un siècle de pratique clinique. Tout d'un coup, le régime sans gras était devenu le régime sain, et cette vue était partagée par les autorités de santé comme le ministre de la santé (Surgeon general) ou celui de l'agriculture (United States Department of Agriculture, USDA).
Ce livre entend démontrer que, en dépit de la foi contemporaine en les méfaits des graisses saturées, et de la conviction que les gros sont gros parce qu'ils mangent trop et ne bougent pas assez, il existe bien des preuves qui suggèrent que ces assomptions sont incorrectes, et ces preuves continuent à s'accumuler. Selon l'USDA, depuis les années 1960, les américains ont en effet consommé beaucoup moins de graisses (de 45 à 35% des calories ingérées), ainsi qu'on le leur recommandait. Entre 1976 et 1996, l'hypertension a baissé de 40% aux Etats-Unis ; le nombre de personnes au taux de cholestérol chroniquement élevé de 28%; le nombre de fumeurs de 8%. Et pourtant, depuis les recommandations officielles de manger moins gras et plus de glucides, le taux d'obésité en Amérique est passé de 12 à plus de 30%. Le diabète a suivi la même tendance.
Avant ce renversement des idées acceptées sur le régime idéal, bien des chercheurs, surtout britanniques, avaient proposé un hypothèse alternative de la cause des maladies cardiovasculaires, du diabète, des cancers du colon et du sein, des caries dentaires et d'autres maladies chroniques, y compris l'obésité, et ce, sur la base des expériences missionnaires et coloniales, dans lesquelles des peuplades isolées découvraient ces maladies en même temps que l'alimentation occidentale moderne. Les glucides raffinés(bière, sucre, farine, riz blanc) étaient considérés comme la cause probable de ces maladies de civilisation.
La compréhension des mécanismes physiologiques, et ses progrès au cours du siècle écoulé, milite également en faveur de cette hypothèse plutôt qu'en faveur de l'hypothèse aujourd'hui dominante selon laquelle les facteurs dominants pour le poids et la santé sont les graisses, les calories, les fibres et l'activité physique.
Dans ce livre, nous envisageons la possibilité très réelle que la plupart de nos croyances alimentaires actuelles soient fausses. Le cas ne serait pas inédit dans l'histoire des sciences. En étudiant critiquement la recherche qui a mené à l'opinion dominante actuelle en matière de santé et de nutrition, ce livre peut sembler partial, mais c'est seulement en ce qu'il présente un point de vue rarement évoqué dans le débat public. L'hypothèse d'un lien entre maladies cardiaques et graisses saturées, par exemple, a toujours rencontré beaucoup de scepticisme parmi les chercheurs, même si elle s'est imposée comme un dogme.
La première partie, « L'hypothèse gras et cholestérol », décrit comment on en est venu à croire que les graisses dans l'alimentation, en particulier les graisses saturées, causaient les maladies cardiaques. La second partie, « L'hypothèse glucides », décrit l'histoire, depuis le 19ème siècle, de l'hypothèse selon laquelle les glucides, en particulier raffinés, sont la cause des maladies chroniques de civilisation, puis décrit les développements scientifiques intervenus depuis les années 1960 qui renforcent cette hypothèse et en proposent des mécanismes explicatifs. Elle s'achève avec la suggestion, largement acceptée, que ce sont les mêmes facteurs d'environnement, de style de vie et d'alimentation qui causent l'engraissement excessif et les maladies chroniques de civilisation. Dans la troisième partie, « obésité et régulation du poids », nous discutons les hypothèses concurrentes sur les causes de l'obésité et du surpoids. Nous étudions en particulier l'hypothèse largement partagée selon laquelle les gros sont gros parce qu'ils mange trop et ne bougent pas assez ; ainsi que l'hypothèse alternative, selon laquelle la qualité des calories ingérées, plutôt que leur quantité, explique les variations de poids.
Pour comprendre si les croyances actuelles sont fondées, nous étudions d'abord les moments de l'histoire scientifique où elles étaient encore controversées : les années 1970 pour l'hypothèse cholestérol, les années 1930 pour l'hypothèse « les gros mangent trop ». Nous cherchons les preuves qui ont semble-t-il, clos le débat et fondé le consensus actuel, et nous les évaluons.
Pour écrire ce livre, j'ai interviewé plus de 600 cliniciens, chercheurs et administrateurs. Une bibliographie détaillée est disponible en fin d'ouvrage.
Whoa, Julot! Good for you. Are you abandoning Julot Ze Blog, or is this just a side commentary blog on nutrition?
RépondreSupprimerHi, UE -- Julot Ze Blog is not abandoned in any way, but it's a blog that is now about restaurants and for an international audiences. Les Dogmes is about nutrition and health, and for a primarily French audience.
RépondreSupprimerHello Julot
RépondreSupprimerTon Blog est vraiment bien, je suis une belge vivant `Boston et j'ai aussi creé un blog du même genre !
Mon blog est http://nutritionetsante.blogspot.com/ et cela serait cool si tu pouvais le diffuser?
J'aimerais aussi mettre ton blog en référence et pouvoir y référencer quelques articles.
N'hésite pas a me contacter
Martine